Keller C'était pas la belle vie tous les jours, Maman elle disait qu'on allait s'en sortir après la mort de Papa. Maman elle disait qu'il avait bien fait de crever après tout. Que c'était un bon à rien, égoïste et violent, qu'elle était restée avec juste pour l'argent. Parce qu'avec tout le trafic qu'il faisait il pouvait bien nous en faire profiter. Et puis Papa il a fait le con une fois de plus. Et puis Papa il s'est pas relevé. Alors Maman elle a dit que je devais rapporter de l'argent aussi. Elle m'a confié à ce vieux oncle Bill. J'sais pas si c'était vraiment mon oncle car il venait pas de la même famille que nous mais bon il avait toujours voulu que je l'appelle comme ça. Au début c'était facile, fallait juste que je rapporte le plus de pièces possibles des vaisseaux échoués, puis après Oncle Bill a voulu que je transporte des paquets de poudre. Il disait qu'on allait pas fouiller un gosse après tout. Il disait vrai. C'était facile pour lui, c'est moi qui faisait les allers-retours. J'avais que six ans.

Haught « Combien étiez-vous à bord ? Décline ton identité petit. » Les yeux de Reza se pose sur les hommes armés devant lui. Il est tout seul à présent dans cette salle bien trop blanche à son goût. « Ben juste deux. Moi et l'pi...Papa » Il faillit faire une gaffe mais se reprit bien vite. Après tout ils étaient des pirates. son père l'avait toujours été alors ce n'était pas tellement un mensonge. « Et c'est qui toi ? et Papa ? » Il roula des yeux. Ils étaient vraiment idiots ou ils le faisaient exprès de répéter les questions ? Ils y avaient pas déjà répondu quand ils s'étaient posés ? « J'm'appelle Reza Haught m'sieur et mon père Larry Haught comme moi. » Cru-t-il bon de rajouter. «  D’où venez-vous ? » Il a déjà oublié ? Et après ça se dit travailler dans les interrogatoires. « Keller, on vous l'a dit tout à l'heure pourtant... » Ça commençait sérieusement à l'agacer mais il avait pas le droit à l'erreur. Haught lui avait dit. Allez on répète encore petit, faut pas de bavures sinon on est mort tous les deux okay? «  Comment avez-vous échappé au Triumvirat ? » Voilà maintenant qu'il parlait dans une autre langue. Il savait juste ce qu'ils avaient répétés, pas les trucs en plus. « Le quoi ? » Il pouvait pas lui filer un truc à manger ? Il avait le ventre qui criait famine, ils entendaient pas ou ils faisaient juste semblant d'être sourds ? « T'as quel âge p'tit ? » Bon déjà le p'tit ça va une fois mais faut pas le trop le pousser Reza. Il va voir le petit ce qu'il peut lui mettre dans la gueule. Regard assassin de son père adoptif, la connexion est déjà établie alors qu'il n'est même pas dans la même pièce que lui. Et puis il a trop besoin de la flotte, il ne peut pas foutre toutes ses chances à la poubelle. « J'ai treize ans m'sieur et presque toutes mes dents. » Glissa-t-il en souriant. Sourire qui s'affaissa bien vite devant les regards exacerbés des douaniers.

We are Legion Être légionnaire c'était pas une option. C'était juste la suite logique. Oh oui il aurait pu finir par être éboueur ou même extracteur mais il avait toujours voulu plus Reza. Et c'est pas ses origines qui allaient le mettre sur la touche de son avenir. Il était légionnaire. Il voulait protéger la flotte, parce que c'était sa maison à présent, parce que c'était mieux que Keller aussi. C'était des valeurs qu'il voulait connaître, qu'il voulait transmettre. Il était pas habitué lui à défendre d'autres personnes en dehors de la sienne. Pourtant y en avait deux autres pour qui il aurait bien donné bien sa vie. Le trio gagnant comme on les appelait. Toujours à se tourner autour, jamais l'un sans l'autre. Des larrons de foire comme on en fait peu. Ah c'était le bon temps. On s'ennuyait jamais avec eux. Le bon temps. Il avait pas prévu ça Reza. C'était pas dans ses plans. Après tout, on oublie jamais d'où l'on vient. On a beau vouloir s'en détacher plus que de raison, on en est jamais débarrassé. Ça vous revient toujours à la gueule pour bien vous montrer que rien n'est acquit. On ne devient personne sans accepter ce qu'on est véritablement.

Oz Et puis il y a l'erreur de trop, l'erreur qui détruit toute une vie. Il aurait pas pensé que ça en arrive là Reza. Il aurait pas pensé. Oz était devenu son meilleur ami. Avec Jy, c'était les deux personnes pour lesquelles il aurait donné sa vie, en dehors de sa femme bien entendu. Dans son besoin de sauver sa mère, il n'avait pas vu qu'il emmenait avec lui Oz dans sa descente aux enfers. Si Bee avait vu ça, si Bee avait comprit ses silences, comprit ses mensonges. Mais Bee ne le regardera jamais plus comme avant maintenant. Faute impardonnable, erreur incommensurable. Le tir sur son ennemi était allé aussi vite que le corps d'Oz qui s'affaissait sur le sol. Il restait immobile mais son corps entier lui criait de courir jusqu'à lui. Il ne pouvait juste pas mourir comme ça, ici, maintenant, sur Keller. C'est lui qui avait fait ça bordel, c'était pas un putain de Kellari, c'était pas le destin ou une autre connerie, c'était lui. Lui. Il se rua sur Oz, réceptionnant sa tête juste avant qu'elle ne touche le sol. Bordel qu'est ce qu'il avait foutu. Un cri déchira le silence. Depuis combien de temps il tenait la tête d'Oz dans ses mains avant que les douaniers qu'ils escortaient n'arrivent ? Il n'aurait pas su dire. Il ne se débattit pas. Il ne réagit pas. C'est son monde qui s'écroule.

Only Love Reza c'était pas le gars amoureux. Il avait jamais vraiment connu ce sentiment. C'est pas qu'il aimait pas les filles, loin de là. Il en était même fou. Un vrai dragueur, comme on en fait plus. Non c'est l'amour qu'il connaissait pas. Le vrai. Celui qui vous donne les frissons, les papillons dans le ventre comme disent les ptites adolescentes. Et puis il y a eut Elle. Et sa vie a commencé. Son monde n'a plus tourné qu'autour d'elle. Elle était belle, innocente, un peu trop souriante mais qu'est ce qu'il aimait la voir sourire bordel. Un soleil dans son univers. C'était sa bouffée d'air frais, son oxygène. Y a bien les regards d'Oz qui l'ont un peu réfréné il faut l'avouer. Il avait pas l'air très ravi à l'idée que sa soeur et son meilleur ami se fréquentent. Et puis il avait trop de respect pour Bee. Mais quand est-il de l'amour alors ? « Rez', tu sais jt'en voudrai pas hein. » La voix d'Oz le tira de sa rêverie. Encore elle. Toujours. « Qu'est-ce tu racontes ? » C'était comme s'il leur donnait son accord. Comme si même lui ne pouvait rien faire contre ce qui était en train de naître entre eux. « Et je sais que tu prendras soin d'elle. Du moins t'as intérêt. » Elle. Bee. S'il avait su.

Lady Grace Il avait entendu beaucoup de choses sur le Lady Grace, et pas en bien bien-sûr. On lui avait dit qu'aucun homme, ou femme d'ailleurs, n'en revient entier. Qu'on laisse tous une part de soi à la grande Dame. La première année fut peut-être la pire. Car il se retrouva seul face à ses démons. Avec le vide, un trou béant qui lui bouffait les entrailles. Et c'est face à lui-même qu'il fut confronté à la pire facette de sa personnalité. Qui aurait-cru qu'il deviendrait violent, qu'il se battrait contre tout le monde, qu'il essaierait tant bien que mal et d'une façon totalement absurde de perdre la vie. Et ils avaient raison. Le Lady Grace vous montre le pire côté de vous-même. La part sombre vous consume entièrement. Pour n'être plus que l'ombre de vous-même. Peine renouvelée. Le travail était pénible, ça aussi on lui avait bien dit. Mais les regrets et la souffrance étaient encore pires. Parfois, dans sa cellule trop petite aux murs trop sales, il essayait de penser à elle, il essayait parce qu'il s'était bloqué à toute forme de pensée quand il était arrivé, parce que c'est ça qui était le pire, penser. Penser à ce qui aurait pu être sa vie, penser à ce qu'elle pouvait bien faire, ce qu'elle pouvait bien penser de lui maintenant. C'était bien ça le pire, pas le boulot, pas cette prison, penser, c'était ça le pire. Peine renouvelée. On lui a prescrit un nouveau régime alimentaire. Il paraît qu'il est trop maigre pour travailler et ça les inquiètent. Pas le fait qu'il puisse crever non, juste le fait qu'il puisse pas bien faire son travail. Il a beau se forcer, ça passe pas. Ça finit toujours la tête dans les chiottes. Il a plus envie de manger, de travailler, de rester là à penser. Ils ont pas encore comprit ça ? Il a plus envie Reza. Peine renouvelée. Il aimerait bien que sa tête arrête de bourdonner. Il est revenu depuis maintenant deux jours d'un travail assez long et le bourdonnement continue. C'est normal qu'ils disent. Il s'est habitué avec le temps et puis parfois il se dit que c'est pas plus mal. Le bourdonnement est si intense et si présent qu'il ne laisse pas de place à la pensée. Et c'est bien ça qu'elle ait pas de place. Peine renouvelée. Il n'y a pas un jour où il ne pense pas à Oz. Si seulement. Si seulement il n'avait pas accepté qu'il le suive. Si seulement. Ses mains rappent sur son visage boursoufflé par les écorchures. Il ne sera jamais plus le même homme. Si un jour il sort de là. Mais c'est pas pour bientôt qu'ils ont dit. C'est pas pour bientôt. Peine renouvelée. Parfois il a encore la sensation dans ses jambes. Quand il rêve. Il rêve qu'il court, qu'il essaye de la rattraper, ses cheveux volant au vent. Elle est belle. Innocente, souriante. Et c'est là qu'il sait que c'est un rêve. Inutile d'aller plus loin. Ça ne servirait à rien, se donner de l'espoir ne fait qu'aggraver les choses. Et c'est pas ce qu'il veut Rez. Il veut juste qu'on le laisse tranquille. Il veut juste qu'elle le laisse tranquille, bordel. Ne peut-elle juste pas le laisser. Il devient fou. Fou. Peine renouvelée. Il a faillit en perdre ses jambes bioniques aujourd'hui. Il était là, face à lui, dans ce même couloir que lui. Il aurait aimé lui dire quelque chose mais son regard, son regard était remplit de haine, d'incompréhension. Et il avait tout à fait raison, il ne pouvait pas être pardonné. Il avait abandonné l'idée bien avant qu'elle ne se pointe dans un coin de sa tête. Il avait prévu le coup. Mais ça, ça, il l'avait pas prévu. Jy. Pourquoi ? Pourquoi mon pote ? Il en avait presque envie de chialer. Et Dieu sait qu'il n'avait plus de larmes depuis bien longtemps. Peine renouvelée. Comme une lueur d'espoir. Comme si on lui avait envoyé pour lui dire que ce n'est pas fini. Qu'il y a toujours une façon de se racheter. Cette année était de loin la meilleure. Un sourire s'était même formé sur son visage quand Jy et lui étaient tombés sur un astéroïde un peu trop caractériel. Un sourire qui s'était bientôt transformé en grimace tellement les plis sur son visage avaient eut du mal à se faire une place. Bon pour accord de sortie.

'Cause you never give up on family Il ne sait pas trop ce qui a disjoncté dans sa tête Rez quand il a vu sa mère ce jour-là sur la place de Keller. Qu'elle soit toujours en vie après tout ce temps et qu'elle le reconnaisse même pas ou l'état pitoyable dans lequel il l'avait laissé ? Il avait jamais voulu la laisser. « Viens avec moi maman, j'ai entendu un monsieur qui parlait de Wilkinson. Tout le monde en parle maman. » Une claque. Puis deux. « Arrête tes conneries Reza, on a pas les sous pour y aller. » Ses doigts posé sur sa joue encore rouge de douleur il voulu rétorquer mais il savait de quoi elle était capable. Il savait que ça servait à rien. Sa mère était bien trop abîmée, son père et sa mort après n'y avait rien arrangé. Il l'avait éteinte à petit feu. Parfois il se souvenait comment elle était avant. Elle lui faisait souvent des câlins avant. Et puis elle lui racontait des histoires, des histoires d'étoiles et il aimait ça. Mais elle était éteinte maman. Depuis trop longtemps maintenant. Sa main se crispa sur le bras bien trop frêle de sa mère et elle tourna sur elle-même prête à lui en rétorquer un. « Reza » Sa voix était peu assuré, il n'aurait certainement pas dû faire ça. «  Reza ? » Répéta sa mère comme si elle entendait ce nom pour la première fois depuis des années. Oh oui des années. « Oui c'est moi maman. » Sa mère resta interdite, incrédule. Éteinte. Je suis désolé de t'avoir abandonné maman. Voilà ce qu'il avait envie de lui crier. Mais il ne fit rien. Elle avait l'air tellement fatiguée, tellement... malade. « Tu n'aurai pas dû revenir pour moi Reza. »

Betty « Touche pas à ça gamin. » Ses doigts se stoppèrent dans leur course et il roula des yeux. Il avait rien le droit de faire sérieux. Il avait juste envie d'apprendre à s'en servir c'est tout, il lui demandait rien de plus. Après deux années à le servir, il pourrait enfin lui être reconnaissant. « Ma Betty c'est une sensible. » Un léger sourire apparut sur les lèvres du pirate et pour la première fois Reza cru y lire quelque chose. Comme si cet homme pouvait avoir des sentiments. Mais c'était un mot qu'il ne connaissait pas Reza il aurait même pas pu l'assimiler à un état. On lui avait jamais montré de sentiments. « Pourquoi tu l'as appelé Betty Haught ? » Il se racla la gorge, sa mue n'étant pas encore finie. Les deux anciens Kellaris se regardèrent quelques instants, comme si cette conversation les surprenait tous les deux. Faut dire qu'ils n'avaient pas tellement l'habitude de se raconter leurs vies. Haught c'était pas le genre à être bien bavard. « Oh ça remonte à loin gamin. » Fit-il un brin nostalgique, il avait même cru voir ses yeux scintiller. « Madame Haught s'appelait Betty. Elle avait des fesses aussi grosses qu'un astéroïde. » Sa voix trahissait une sorte de rire rauque. « Mais moi j'aimais bien. » Après ça ils ne reparlèrent plus jamais de Betty. Mais quelque chose les avait rapproché. Après des années il avait comprit, Betty, Betty les avait rapproché. « Votre Terminal. Vos affaires personnelles. Et vous avez acquis le vaisseau de votre père, mes condoléances. » Il avait pas l'air très désolé le gardien du Lady Grace quand il lâcha ça. Merde alors Haught était mort. Et il se retrouvait avec Betty sur les bras. Quoi que c'était pas si mal, il pourrait passer quelque temps là-bas, il pouvait pas retourner à son ancienne habitation. Elle avait dû la rendre et prendre une autre cabine de toute façon, ça servait à rien d'y retourner. Maintenant c'était plus que lui et Betty.

There was a way out for him C'était la première chose qu'il devait faire. La première qu'il voulait faire. Il ne demandait pas le pardon, il ne le méritait pas. Mais il leur devait bien une explication. Après tout ce qu'ils avaient fait pour lui, ils lui avaient donné sa main, une maison, une famille. C'était sa famille à présent. Bien plus que la sienne. Et il les avait trahis, pire il les avait meurtris. Il connaissait le chemin par coeur, il y avait passé tellement de temps. Ses jambes bioniques pourtant l'apprenaient pour la première fois. Il venait à peine de rentrer du Lady Grace. Son poing s'attarda un moment à quelques centimètres de la porte de la cabine. Il l'aurait jamais dit mais il avait peur. Peur de découvrir un sentiment bien trop fort dans leurs regards. A quoi s'attendait-il après tout ? Un coup, puis deux. A son habitude. La porte s'ouvrit doucement, il s'attendait à voir Betty, ses prunelles remplies d'étincelles mais il n'en était rien. Will lui fit face. Leurs yeux se croisèrent, et comme s'il comprenait qui était devant lui, le regard de Papa Will se changea brusquement, ses traits se durcirent et il agrippa la porte comme pour s'empêcher de lui en coller une. Ces huit années avaient eut raison de lui. Ou peut-être était-ce la douleur de perdre un être cher qui avait eut raison de lui. « Je sais que je suis la dernière personne que vous voulez voir, je ne mérite même pas de me tenir devant vous Will mais je voulais... » Il se tut. Le regard foudroyant de son beau-père lui transperça le coeur. Il n'était peut-être pas prêt pour ça. Il avait répété pendant huit ans pour ce moment pourtant il en perdait tous ses moyens. Abîmé par tant d'années de servitude sur le Lady Grace, il n'avait même pas prit la peine d'attendre quelques jours avant de se montrer aux Bishop. « Je ne veux pas votre pardon, je ne le mérite pas. Et m'excuser serait déplacé. Je voulais juste que vous sachiez que votre fils était un homme bon, le meilleur que je connaisse et... » « Ne parle pas de mon fils sale petit... » Un doigt, pointé dans sa direction. Will le baissa, à bout de force. Reza ravala une larme qui voulait s'échapper. « Tout est de ma faute Will. Oz ne savait pas, il voulait juste me protéger. Tout est de ma faute. » Will resta interdit, comme si la colère bouillait en lui mais il ne laissait rien exploser. Ce n'était qu'une question de temps. Mais il devait le dire, il le devait. « Est-ce que Betty... » Une main, sur son torse. La pression, intense, le fit reculer de quelques pas. « COMMENT OSES-TU ! » Sa bouche, s'ouvrit comme pour dire quelque chose mais que pouvait-il dire ? Il ne pouvait soulager sa peine, encore moins il ne pouvait l'enlever. C'était à cause de lui si ces parents avaient perdu leur fils. Si leur fille s'était retrouvée sans mari, trahie. Oh Bee si tu savais comme je suis désolé. « BETTY EST MORTE. » Lâcha-t-il comme si c'était plus douloureux que de respirer. Reza trébucha, comme si ses jambes bioniques avaient dysfonctionnées sous le poids de la nouvelle. « Qu... Je... » Il n'en trouvait pas les mots. « Bee... » Mais il n'eut pas le temps de continuer, Will avait huit années sur le coeur. « Ne t'approches plus de notre famille tu m'entends ? A cause de toi il n'y a plus que ma fille et moi, tu n'es qu'un poison, Oz est mort par ta faute et Bee, tu as pensé à Bee dans tout ça ? » Il avait raison. Il avait raison mais ça faisait mal. « Si ça tenait qu'à moi je t'aurai déjà tué de mes propres mains. MAINTENANT DÉGAGES ! » Il fit quelques pas en arrière, il ne venait que de remuer le couteau dans la plaie encore et encore. Il n'était vraiment qu'un idiot. Un moins que rien. Qu'avait-il fait à cette famille ? « Je suis sincèrement désolé. » Fut ses seuls mots quand il se détourna de Will et de cette maison dans laquelle il avait tant de souvenirs. Dysfonctionnement. Son coeur s'arrêta de battre. C'est possible ? Sans doute. Elle était là, au loin, il pouvait la remarquer entre toutes. Pourtant c'est comme si elle était différente. Et elle était différente. Son sourire. Ce n'était plus le même. Elle avait beau sourire quand ses yeux s'étaient posés sur lui, ce sourire en apparence jovial était tout autre. Il la connaissait que trop bien. Ne t'approches plus de notre famille tu m'entends ? Elle passa non loin de lui pour rejoindre son père et il accéléra le pas, sa marche plus saccadée que d'ordinaire, comme si ses jambes n'arrivaient pas à suivre. tu as pensé à Bee dans tout ça ? Tous les jours.

Didn't fool you but I failed you Huit ans et neuf jours. Ça lui paraissait une éternité. C'était une éternité. tu as pensé à Bee dans tout ça ? Pas assez apparemment. Pas assez car il avait été incapable de la protéger contre lui même. Il n'avait jamais voulu la trahir, il voulait juste la tenir à part. Ne pas la mêler à tout ça, la garder innocente, vivante, c'est tout ce qui comptait. A trop vouloir la protéger, il l'avait laissé étouffer dans un cocon qu'il avait lui même érigé. Et dont la plupart de ses silences n'étaient que pour cacher des mensonges. Des non-dits. Voilà là où il avait mené leur relation. Une relation basée sur des non-dits car il était honteux de sa propre famille, de son histoire, de lui. Il ne l'avait jamais mérité de toute façon. La bague comme incrusté dans son annulaire mit un temps avant de se détacher de sa peau. Une grimace crispa son visage et il la fit rouler entre ses doigts. Depuis maintenant plus de onze ans, cette bague n'avait jamais quitté un seul jour son doigt. Même sur le Lady Grace, il ne s'était jamais résolu à l'enlever. C'était plus fort que lui, il n'y était jamais arrivé. Comme si il y avait encore un espoir. Quelque chose. Et puis ça lui donnait du courage. Une raison. Une attache. A présent, seul, dans la couche du Betty, il ne pouvait la garder comme si tout allait redevenir comme avant. Plus rien n'était comme avant. Ils n'étaient plus que des étrangers. Foutus étrangers. Il passa l'anneau dans un cordon et le fit pendre avant de nouer les deux bouts. Comme un souvenir qu'on accroche. Qu'on cache. Il passa la corde autour de son cou et s'attarda un instant sur l'anneau avant de le ranger définitivement sous sa chemise. A l'abri de tous les regards. Comme un souvenir. Qu'elle oubliera. Didn't they say that only love will win in the end ?