Messages : 433 Âge : 38 ans Occupation : Docker de la commission Habitation : Argus One Arrivée : 2200Pseudo : Canard Avatar : Golshifteh Farahani Crédits : minako (av), old money (sign), elara (crackship)
Il avait suffi d’une mention du nom au cours de la soirée des élections pour attiser la nostalgie de Rosalija. Anastasia avait dit bien des choses pendant la réception – certaines qu’elle préférait oublier, dans le déni le plus complet. Elle préférait s’appuyer sur les quelques syllabes qui avaient retenu son attention. Marcus Riley. Bien plus agréable de s’imaginer toutes les nouvelles qu’ils auraient à rattraper, toutes les nouveautés dans leurs vies respectives, que de continuer à s’apitoyer sur la question ultime d’Anastasia, avant que Rosa ne quitte la soirée. Comment elle se sentait vis-à-vis de la possibilité de reprendre contact avec la Terre et de connaître le sort que le destin avait réservé à son paternel ne regardait qu’elle, peu importe le respect et l’estime qu’elle éprouvait envers Anastasia et leur amitié. Après une réflexion passive, songeant à tendre la perche au sergent à l’occasion, il avait suffi de quelques jours pour qu’elle envoie un message à Marcus, l’invitant à la rejoindre à la Ruche si ça lui convenait – elle y serait de toute façon, et si elle espérait une réponse positive, elle avait depuis longtemps passé le stade où le moindre refus l’irritait. Le bar, niché dans le Colossus 5, était comme une deuxième maison – une transition entre le poste de contrôle des douanes et sa cabine, un passage obligé quasi quotidien. C’était rarement pour le simple plaisir de boire ou de noyer sa peine qu’elle y mettait les pieds. Il n’était pas rare qu’elle opte pour des consommations non-alcoolisées, appréciant simplement l’ambiance du bar pour lire, finir des rapports ou juste relaxer. À cette occasion, c’est terminal à la dextre, whisky à la senestre qu’elle s’installe dans le fond du bar, avec vue sur la porte, peut-être dans l’espoir de voir Marcus la franchir, même si ses yeux foncés rivés sur l’écran de son appareil ne risquaient pas de déceler la présence du légionnaire de sitôt. La voix grave de son collègue parvient finalement à ses oreilles; elle lève la tête, par réflexe, accrochant aussitôt un sourire à ses lèvres fines. « Pas du tout », l’assure-t-elle alors qu’il prend place à la table. À vrai dire, elle n’attendait pas particulièrement – après tout, il n’avait jamais donné suite à son invitation, même s’il était sous-entendu qu’elle tenait quoi qu’il en soit.
La question de Marcus est frappante dans sa trivialité. Ils n’avaient pas eu l’occasion de discuter depuis des semaines, voire des mois, et à vrai dire, elle n’aurait pas pu être en mesure de mieux entamer la conversation. Comment faire autrement, de toute façon? Où commencer lorsqu’on ne savait plus trop où on avait terminé, tout ce temps auparavant? « Bah. La routine, malgré tout », fait-elle dans un demi-sourire. Malgré les élections, malgré les changements qui se profilaient, dans une certaine mesure – pour ce qui était du couramment connu, des événements de notoriété publique. Sur un autre plan, elle venait d’apprendre que son ex était un meurtrier psychopathe dans une autre vie et qu’il était passé à ça de tuer son meilleur ami, mais elle n’allait certainement pas s’amuser à briser la glace avec ce genre de révélation, qu’elle garderait soigneusement privées jusqu’à la fin de ses jours. « Je soupçonne que les gros changements sont encore à venir. Avec Mugheri à la tête de la flotte… » Elle laisse au silence le soin de terminer sa phrase. Marcus comprendrait sans doute qu’elle n’était pas nécessairement convaincue par la nouvelle tête de la flotte. Rosalija avait voté pour Rosenstein, par pur égoïsme, et pourtant elle ne se sentait pas lésée par les résultats – ils étaient bénéfiques pour elle, dans un autre ordre d’idées. « Et toi, alors? » Elle lui retourne la question bien malgré elle, contrainte par le code social, par l’habitude, par la politesse. Dans d’autres circonstances, en différente compagnie, la réponse lui aurait peu importé. Cette fois, elle se surprend à réellement attendre de savoir ce qu’il avait à dire, ce qui avait pu l’occuper pendant ces longs mois. Ni l’un ni l’autre n’étaient du genre à s’envoyer des messages pour rien, juste pour dire bonjour, pour prendre des nouvelles superficielles. Pourtant, elle n’avait rien trouvé de mieux à dire que l’équivalent de pas grand-chose alors qu’ils n’avaient pas eu la chance de discuter depuis longtemps. On ne changeait pas, après tout.
Elle laisse Marcus prendre ce qui lui plaît, détaillant son visage, son attitude. Il y avait quelque chose qui avait changé, mais elle ne saurait dire quoi. Peut-être n’était-ce qu’une impression, aussi; qu’elle se rendait compte que son souvenir ne collait pas à la réalité. « Quand même ironique que ce soit Anastasia qui m’ait fait penser que ça faisait bien trop longtemps qu’on avait pas pris cinq minutes pour se mettre à jour », fait-elle finalement lorsqu’ils sont tous deux servis, levant son verre pour le faire tinter contre celui du légionnaire. Ironique parce que connaissant le préjugé défavorable de la milicienne à l’égard des membres de la légion, Rosa n’aurait pas imaginé que son amie aurait pu passer du temps de qualité avec Marcus, même si la présence d’Elara à la soirée des élections avait pu adoucir le tout. Elle n’ose pas aborder le sujet de Galina; la dernière fois qu’ils s’étaient vus, la plaie était encore trop fraîche, et avec le temps, elle n’osait même plus s’aventurer sur cette pente glissante. La question lui brûlait toutefois les lèvres – pas son ex-femme en tant que tel, mais bien la période post-Galina dans laquelle il se trouvait présentement. Rosalija n’était pas du genre curieuse relativement aux histoires de cœur des autres, et pourtant, la déferlante d’émotions qui s’était abattue sur elle récemment lui donnait envie de savoir si tout le monde était aussi misérable qu’elle. D’un côté, elle espérait que non. De l’autre, savoir qu’elle n’était pas la seule à galérer la rassurerait.
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Rosalija répond au sourire de Marcus avec un petit sourire coi, comme quelqu’un qui ne veut pas remuer la poussière, mais qui en a encore long à dire. Ce n’était ni l’endroit ni le moment de commencer à débattre de politique. Chacun avait ses opinions et la douanière n’était pas prête à saboter l’une de leurs rares rencontres à se chamailler sur les implications de toute cette histoire – elle soupçonnait néanmoins que le légionnaire partagerait l’essentiel de ses préoccupations si jamais le sujet devait refaire son apparition dans la conversation. Quant à la participation involontaire d’Anastasia dans l’organisation de leur réunion impromptue, elle relevait simplement d’une suite de réflexions démarrées par la mention des deux personnes avec qui elle avait discuté pendant la soirée. Le fait qu’elle se soit gentiment moquée de Marcus, sans doute en service alors que la blonde avait elle-même eu la chance de porter une robe pour l’occasion – un rare luxe sur la flotte, lorsque l’essentiel des fédérés avaient l’obligation de porter leur uniforme, et pas grand-chose d’autre à mettre lorsqu’ils n’étaient pas en service. Il faut dire que le fait qu’elle n’ait mentionné aucune forme de jalousie ou de mépris à l’endroit des légionnaires poussait Rosa à croire que sa meilleure amie était sur la bonne voie. Elle s’était accrochée bien trop longtemps à toutes ces histoires d’envie et de rancœur, et elle méritait de passer à autre chose, de soigner cette plaie qui refusait de guérir entièrement. « J’en doute pas. Personne avait envie d’être en service après c’qui s’est passé au dernier rassemblement », souligne-t-elle en prenant une première gorgée dans son verre. Le souvenir de l’émeute était encore désagréablement frais, mais le bon déroulement de la soirée électorale avait suffi à permettre aux concernés de reprendre un peu de confiance, de considérer que ce débordement était une exception et non la norme.
Quant à Rosa elle-même, l’élément phare de sa soirée n’avait pas été le dévoilement du candidat élu, son attention plutôt accaparée par le comportement erratique d’Ethan avant qu’il ne lui apprenne que Khan était la personne qui l’avait ainsi amoché – et aussi la personne qu’il regrettait tant d’avoir abandonné dans l’espace. Un gros morceau à digérer et l’un qu’elle n’avait pas encore décidé comment elle abordait. Sans qu’elle puisse s’en empêcher, son sourire se tord légèrement en se rappelant les circonstances malencontreuses qui avaient ponctué la soirée. « Ah… Bof. » Elle fait mine de prendre une longue gorgée de bière, s’accordant quelques secondes supplémentaires pour réfléchir à une façon satisfaisante d’expliquer sa mine déconfite. « Rosenstein a perdu, ça m’a fait chier, pis… ‘fin je me suis encore pris la tête avec ma sœur pour une bêtise, ça m’a pourri ma soirée plus qu’autre chose. Je suis pas restée longtemps. » Le mensonge était éhonté, mais Rosa pensait connaître Marcus suffisamment pour savoir que même s’il soupçonnait quelque fausseté dans ses paroles, il n’en ferait pas un plat. Les meilleurs mensonges étaient ceux qui reflétaient la réalité, et il était de notoriété publique parmi quiconque l’avait côtoyée plus ou moins fréquemment dans les dernières dix années que les demi-sœurs Saroyan-Kinsley étaient loin d’être fusionnelles.
Un bref silence plane finalement alors qu’elle enfile une autre lampée d’ale, observant les alentours, les autres personnes attablées autour d’eux. Des groupes d’amis, des couples, des solitaires – comme elle, bien trop souvent, alors qu’elle sortait du travail, avant que les bars ne ferment définitivement leurs portes pour la nuit. « T’as hâte d’aller faire quelques tours sur Keller? » demande-t-elle finalement dans un petit sourire entendu. Rosalija avait eu la malchance de poser les pieds sur la station quelques fois, rarement, dans le cadre de ses fonctions, et espérait que les politiques d’ouverture de l’amirale ne feraient pas en sorte que la fréquence de ses visites soit augmentée. « Enfin, pour ma part je déteste, mais y’a un certain charme à quitter la flotte et mettre les pieds ailleurs de temps en temps. Keller est un vrai trou à rat, mais c’est plus facile quand y’a personne qui s’inquiète pour toi à la maison », relativise-t-elle, parlant d’expérience. Puis un éclair de panique traverse ses yeux pendant une microseconde alors qu’elle relève la tête. Maintenant qu’elle y pensait, elle avait parlé trop vite, ignorant si Marcus s’était casé après sa rupture, s’il en était déjà à ce stade. « Ou euh, ‘fin… » tente-t-elle de se rattraper avant d’abandonner, laissant échapper un petit rire nerveux. « J’dis ça, mais j’en sais rien. Tu vois quelqu’un? » Autant assumer sa bourde et demander directement. Si elle avait de la chance, il rigolerait et répondrait non.