Pain was their body's way of telling them that they'd pushed themselves to their limits -- which was exactly where they were supposed to be.

Ton corps fracasse le sol dans un son étouffé. Merci aux matelas – ou pas, parce qu’ils ne sont plus tout jeune. Parce qu’il y a assurément trop d’entrainement ayant lieu ici et qu’ils ne font plus tout à fait correctement « l’affaire. » Ce qui explique la douleur qui irradie déjà dans ton dos. Celle qui fait s’approcher une silhouette au loin – l’ennemi actuel, celui qui te contracte la mâchoire. Celle qui assombris le regard de Jesper – inquiet, le petit père hein? Mais tu redresses un bras, pour qu’il t’aide. Pour qu’il te redresse. Pour qu’on comprenne que tout va bien. Tu peux recommencer. Tu veux recommencer. Il n’en faut pas davantage et tu retrouves la verticale, avec aplomb – presque des ressorts dans les talons. Tu respires fort, tu sues encore davantage, t’essuyant le front d’un bras. Tu ne fais pas trop attention au sang qui coule de ton nez. Celui que ton partenaire de combat, fixe – un instant de trop. Ce qui lui mérite un haussement de sourcil. « J’vais bien, en position Jes! » que tu jappes presque. Parce que malgré tout ça – ta respiration laborieuse, ton corps douloureux, ton nez qui saigne – tu n’es jamais que frustration. Parce que c’est toi qui ait exigé que vous rejoignez la salle d’entrainement aujourd’hui. Jesper comme une bouée. Ton sauveur temporaire – perpétuel en réalité.

Tu reprend ta position de défense et lui fait signe d’approcher. D’une main. Presque arrogante – sauf que non, pas avec du sang plein le menton. Celui qui attire un peu trop le regard de ton meilleur ami. Ce qui t’arrache un soupire. « Arrête, c’jamais qu’du sang ok? Concentre toi! » S’il veut pouvoir te balancer un autre coup, il faut. Parce que jusqu’ici, vous n’êtes assurément pas au top de votre forme. Probablement parce que tu enrages encore de ta situation actuelle avec Marcus – celle t’ayant poussée à réveiller Jesper tôt ce matin. Celle qui explique que tu l’ai trainer jusqu’ici, lui rappelant combien ce serait agréable de relâcher toute la tension accumulé dans vos muscles. Or, vous êtes des militaires, l’entrainement, c’est une partie importante de votre vie. De votre formation. Il ne pouvait pas refuser ton offre – mais peut-être l’aurait-il fait s’il avait sut tout ce qui bouillonnait déjà en toi? Ce qui explique son coquard actuel. Celui que tu lui as offert en jouant trop durement, dès les premières minutes. Oh, tu t’es excusé Rian – tu le pensais même – mais tu fais de ton mieux, depuis, pour ne pas dépasser les limites. Celle de ta propre rage. Ce n’est pas sur Marcus que tu cognes, tu ne l’oublies plus.

Il approche et tu esquisses un petit sourire – rassurée que Jesper n’abandonne pas. Il est plus costaud, allons donc! « Aller, attaque moi! Ne retiens rien et arrête de fixer mon menton, ça ne me fait pas mal. » Bon d’accord, tu grimaces, mais ne perd pas ton petit sourire – pas avec lui. « Okay, pas trop mal. Vas-y, balance tout! » Il ne reste plus qu’à prier pour que ce ne soit pas trop maladroit et que cette fois, il te dégomme un œil. Qui sait, avec lui, tout est possible.

EIRIAN + JESPER.

BAM !

Le corps heurta le sol comme un pantin qui s’était pris les pieds dans ses propres fils. « Te casse pas le genou, Rian ! » La remarqua fusa dans l’air avec légèreté, mais le sourire qui ornait le visage de Jesper se crispa lorsqu’il vit l’état dans lequel il venait de mettre son amie.

Des perles de sang gouttaient de son menton, déposant des fleurs carmin sur les matelas étendus au sol. Leurs pétales macabres attirèrent l’oeil du légionnaire. « J’vais bien, en position Jes! » Elle allait bien ? Vraiment ? « Ouais, c’est ce que disait mon grand-père aussi après avoir mangé ce fruit de mer périmé » rétorqua Jesper, reportant son attention sur la blessure de son amie, contrarié. « Il est mort » ajouta-t-il, se retenant d’essuyer le menton d’Eirian avec la manche de son t-shirt. A la place, il essuya d’un revers de main ses propres joues maculées de sueur. « Ceci dit, j'suis pas certain que ce soit à cause de ce fruit de mer. Je crois qu'il avait aussi des problèmes cardiaques. » Il haussa les épaules et fronça les sourcils, avant de se remettre à scruter avec inquiétude le visage de son amie.

« Arrête, c’jamais qu’du sang ok? Concentre toi! » Se concentrer ? Comment voulait-elle qu’il se concentre ?! Elle lui avait bondi dessus comme si elle voulait lui arracher les yeux, noircissant d’un coup bien placé l’un d’eux - ses yeux, quoi ! la seule chose dont il était fier, dans son physique ! -, et elle était désormais couverte de sang ! Comment était-il censé de concentrer ?

Son esprit avait d'autant plus de mal à se focaliser sur la situation qu’il avait très peu dormi la nuit précédente, en proie à une nouvelle insomnie. Il avait tant bien que mal cherché à l'éradiquer à grands renforts de tabac mélangé à des herbes dénichées au marché noir, et il se sentait encore un peu cotonneux. Et ses réflexes alourdis ne l'avaient pas aidé à esquiver les attaques d’une Rian survoltée.

« Aller, attaque moi! Ne retiens rien et arrête de fixer mon menton, ça ne me fait pas mal. » Ou elle fanfaronnait, ou elle avait une sacrée tolérance à la douleur. Dans tous les cas, Jesper ne pouvait s’empêcher d’être impressionné. Cette fille devait remplacer ses rations d’insectes en poudre par du lion, c’était la seule explication plausible !

Eirian grimaça néanmoins légèrement, et ce fut comme si une minuscule faille s'ouvrait dans son masque. La voir baisser la garde, même brièvement, fit sourire Jesper avec un mélange de résignation et de tendresse. « Okay, pas trop mal. Vas-y, balance tout! » « Même si tu crachais du sang par tous les orifices, tu voudrais encore te battre, hein ?»

Il finit par se mettre en position d’attaque, bandant ses muscles. « Tu l’auras voulu.» Il n’aimait pas spécialement attaquer des personnes blessées, mais leur entraînement de légionnaire leur commandait d’être impitoyables. Néanmoins, impitoyable ou pas, il savait qu’il fallait savoir s’arrêter lorsqu’un camarade était trop sévèrement blessé. Le but était de s’entraîner, pas de finir réduit en compote. Ou estropié. « J’sais pas qui tu cherches à impressionner, Rian, mais j’suis pas sûr que te vider de ton sang soit une bonne méthode. » laissa tomber Jesper, dans un ultime espoir de la raisonner.  

Il mentait, évidemment ; il savait pertinemment qui avait mis Rian dans un tel état de fébrilité. Il connaissait trop bien sa meilleure amie pour ne pas savoir lire à travers les silences et les plis de son visage. Il voyait bien les regards qu’elle posait sur Marcus ; il pouvait presque sentir l’électricité qui parcourait son épiderme lorsque leur supérieur était dans les parages, des ordres bordant ses lèvres. Jesper avait du mal à comprendre ce que lui trouvait sa meilleure amie - les seuls frissons qui le parcouraient, à la vue de l’homme, se rapprochaient plutôt des frissons d’horreur -, mais il avait fini par se faire une raison : il y avait des mystères qui n’étaient pas faits pour être résolus, et la fascination de Rian pour le légionnaire en faisait partie.

Il aurait voulu pouvoir l’apaiser d’une parole, d’un geste, mais il ne savait quel geste accomplir ou quelle parole prononcer.

Alors il fit ce qu’elle lui demandait. Le poing droit clos, il fit mine de viser son visage déjà blessé, mais ce n’était qu’une feinte ; la véritable coup venait du poing gauche, qui déjà se précipitait en direction de l’abdomen de la jeune femme. Sans chercher à comprendre si elle avait réussi à l’esquiver, le bloquer ou si elle avait reçu l’attaque de plein fouet, sa jambe gauche prit le relai, frappant durement son tibia - du côté de la jambe en bon état ; il n’avait pas envie de se prendre par mégarde sa prothèse - pour la faire vaciller. Un dernier coup de poing fusa en direction de son visage. Et cette fois-ci, ce n'était pas une feinte.

Il s’arrêta ensuite afin de reprendre son souffle, essuyant son visage rougi par l'effort. Son oeil blessé battait à un rythme sourd et il ferma brièvement les paupières pour le reposer.

 « Toujours dans la course, Rian ? Ou tu déclares forfait ? »